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Un visage, un nom

témoignages du nunavut

Témoignage de Mathewsie Ashevak

Un visage, un nom
par Mathewsie Ashevak, février 2004

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« Je commencerai tout d'abord par me présenter : je m'appelle Mathewsie Ashevak et je viens de Kinngait, au Nunavut. Au cours de mes vacances de Noël, j'ai apporté avec moi à Kinngait une quarantaine de photographies. J'ai pu obtenir le nom de la plupart des personnes qui figuraient sur ces photos lorsque j'ai interrogé ma grand-mère, Kenojuak Ashevak, mon grand-père par alliance, Pauta Saila, et sa femme, Petalusie Saila.

J'ai vraiment trouvé intéressant de montrer ces images aux aînés; c'était un peu comme les ramener à l'époque de leur jeunesse. Lorsque je cliquais sur une image, j'observais leur regard. Quand ils reconnaissaient quelqu'un, ils avaient un grand sourire. Ils réagissaient comme si on avait pris ces photos la veille.

Auparavant, je n'avais pas beaucoup de conversations avec les aînés. Il s'agissait d'une nouvelle expérience pour moi et c'était vraiment agréable. Chaque fois que mes grands-parents reconnaissaient quelqu'un, je me disais que j'aurais aimé vivre à l'époque dont ils parlaient. L'observation la plus intéressante fut celle de les entendre dire à quel point c'était bien dans ce temps-là, lorsqu'il n'y avait pas autant de maisons et de chemins… se promener d'un campement à l'autre… c'était la vie de nos aînés, ils devaient travailler pour subsister.

Mon grand-père par alliance, Pauta, vivait à environ 80 km au nord-ouest de Kinngait. Son père, Saila, était chef de campement de tous les habitants de la région de Kinngait. Saila était également chaman, c'est pourquoi Pauta connaît particulièrement bien le chamanisme. Pauta s'est souvenu à quel point Nurata, son ancien campement, était convenable, et il a rappelé qu'on pouvait encore de nos jours y trouver des objets laissés là par des baleiniers.

Le rôle de Petalusie, l'épouse de Pauta, a aussi été très utile au projet. Elle a plus de 80 ans et a besoin d'aide, mais elle se rappelait l'époque dont Pauta et moi nous parlions.

L'entretien avec ma grand-mère ne s'est pas déroulé comme celui que j'avais eu avec les deux autres aînés. Je n'imaginais pas ma grand-mère vivant dans les années soixante, une des époques les plus difficiles pour les Inuits d'après ce qu'on m'a dit. Kenojuak, qui habitait à environ 40 km de Kinngait, dans un camp appelé Itilliarjuk, a nommé tous les gens qu'elle reconnaissait sur les photos.

Ma participation au projet m'a permis de mieux comprendre la manière dont nous devrions organiser notre territoire, le Nunavut. J'ai constaté que nos aînés ont perdu beaucoup de leur culture, et je n'oublierai jamais qu'ils arrivaient à régler des problèmes beaucoup plus graves que les miens. Lorsque les aînés regardaient les photographies, ils souriaient comme s'ils revivaient le bon vieux temps. Pauta a reconnu son père et deux de ses sœurs, et Kenojuak a reconnu son fils et son mari. Lorsque je voyais la joie sur leurs visages, je ne pouvais que leur rendre leur sourire et être heureux de prendre part à cette expérience. »

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